Les sacrements (39) : Versé pour qui ?
Pour qui Jésus-Christ est-il mort – pour nous, pour beaucoup ou pour tous ? Cette question pose un petit mais important changement dans la formule de consécration pour la sainte cène. La réponse est bien documentée.
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Il faut regarder de près pour découvrir cette différence, induite par la réforme de la liturgie en 2011 : le sang de Christ n’est plus versé pour le pardon « de vos péchés », mais répandu « pour beaucoup », selon la nouvelle formule de consécration.
Des preuves pour tout
Comment cela s’accorde-t-il avec la vérité fondamentale de l’Évangile, selon laquelle « un seul est mort pour tous » ? – comme le formule par exemple la seconde épître de Paul aux Corinthiens. D’autant plus que « pour beaucoup » est aussi absolument biblique : la traduction littérale du grec « hypér pollôn » dans les récits eucharistiques selon Marc et Matthieu. L’expression est placée côte à côte avec « pour vous ».
Les Pères et les Docteurs de l’Église d’Origène à Thomas d’Aquin se sont déjà creusé la tête à ce sujet, sans résultat probant. Néanmoins, pendant des siècles, on a entendu « pour beaucoup » au moment de la consécration, chez les catholiques, les orthodoxes ou encore les anglicans. Seuls les protestants se sont limités à « pour vous ».
Pour ou contre
C’est précisément un érudit protestant qui a jeté la liturgie catholique par-dessus bord à ce moment-là. Sa contribution à un dictionnaire de renommée internationale sous le mot-clé « polloi » a eu un tel impact que le concile Vatican II a autorisé les traductions vernaculaires en 1968. Depuis, la formulation catholique est « pour tous » dans de nombreux endroits.
Près de 40 ans plus tard, à partir de 2006, le Vatican a cherché à retourner à la formulation « pour beaucoup ». Depuis, les scientifiques n’ont cessé de débattre à ce sujet. La controverse « pro multis » était née, du nom de la traduction latine de « hypér pollôn ». Et c’est précisément dans cette phase que se produit le passage, dans la liturgie néo-apostolique, de « de vos péchés » à « pour beaucoup ».
Prononcé pour qui ?
Ce qui est clair, à présent, c’est que l’argumentation de l’article du lexique est fortement ternie, voire réfutée. Car l’auteur a eu recours à une hypothétique rétro-traduction en araméen, une méthode trop spéculative pour les scientifiques d’aujourd’hui.
Les spécialistes sont au moins d’accord sur un point : que la liturgie dise « pour vous », « pour beaucoup » ou « pour tous » est moins une question biblique ou linguistique qu’une question théologique de conception de la liturgie : à qui s’adresse l’invitation à célébrer le sacrement ? Et dans quel contexte est-elle prononcée ?
« Jésus est venu pour tous les hommes, mais tous ne le reçoivent pas. », souligne le « Catéchisme » de l’Église néo-apostolique. « Pour obtenir le pardon des péchés et échapper à la mort spirituelle, le pécheur doit remplir cette première condition qui consiste à croire en Jésus-Christ comme étant le Rédempteur », est-il également écrit. Et enfin : « Les conditions sine qua non à la digne réception de la sainte cène sont un cœur repentant et avide de salut, et la foi. »
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