Incrédule ? Eh bien, c’est précisément celui qui doute qui parvient au plus près de Dieu. D’ailleurs Thomas (qui est souvent incompris) en est le principal témoin. Voici donc un regard quelque peu différent sur l’histoire de Pâques.
À vrai dire, l’histoire tourne en rond : Au chapitre 10 de l’Évangile selon Jean, il se passe trois fois la même chose… ou presque. C’est l’alternance du questionnement et de la réponse, de la recherche et de la découverte.
Question et réponse
Où est Jésus ? C’est la question que se pose Marie de Magdala, en arrivant au sépulcre le matin de Pâques. C’est aussi la question que se posent Pierre et le « disciple que Jésus aimait » (la plupart du temps identifié avec Jean), après leur course de vitesse vers le sépulcre. Et c’est enfin ce que se demande également Thomas, en mettant en doute le récit de ses condisciples.
Jésus est ressuscité ! C’est la réponse qu’obtient Marie, lors de sa rencontre avec celui qu’elle prend pour un jardinier. Et cette réponse est aussi donnée aux disciples et, finalement, à Thomas, le retardataire, à l’une des occasions où Jésus apparaît dans le cercle de ses disciples.
Chercher et trouver
Les choses semblent tourner en rond, mais, à chaque répétition, l’événement, gagne en importance : une spirale ascendante s’amorce.
Intéressons-nous notamment à la recherche : Marie voit seulement le sépulcre ouvert et se met à chercher dans les environs. Pierre et Jean ont, quant à eux, le courage d’entrer dans le sépulcre et découvrent qu’il est vide. Thomas est, lui aussi, en quête. Son doute donne cependant une dimension plus intérieure à sa quête.
C’est plus flagrant encore au moment de la découverte : Marie reconnaît en Jésus son Mâitre (Rabbouni). Les disciples, eux, reconnaissent leur Seigneur (Kyrios, Maître). Thomas est le seul à appréhender la nature profonde de Jésus-Christ : « Mon Seigneur et mon Dieu ! » (theos).
Distance et proximité
L’Évangile selon Jean montre à l’évidence à quel point celui qui doute parvient au plus près du Seigneur : Jésus avait dit à Marie de se tenir éloignée de son corps de résurrection : « Ne me touche pas ! »Aux disciples, il montre ses blessures, mais seul Thomas est autorisé à toucher ses cicatrices.
Marie se voit confier une simple mission, celle de renseigner les disciples. Les apôtres sont, quant à eux, investis d’un pouvoir de grande portée, savoir celui de pardonner ou de retenir les péchés. Et Thomas ? Il a d’abord droit à une remontrance pour ne pas avoir cru sans voir.
Passé et présent
« Heureux ceux qui n’ont pas vu, et qui ont cru ! »À qui le message central de ce chapitre s’adresse-t-il ?
La réponse à cette question révèle à nouveau une spirale ascendante qui va de la démarche matinale de Marie, en passant par la course nocturne de Pierre et de Jean, jusqu’au retour de Jésus, le même jour de la semaine suivante. Sa gradation part de l’individu, passe par les deux représentants des disciples, pour atteindre le collectif des disciples une première fois, puis une deuxième, en présence de celui qui avait d’abord été absent.
Bref, l’exhortation s’adresse à tous les hommes de toutes les époques. Elle s’adresse à nous, ici et maintenant. Nous sommes Thomas. Nous entendons le message pascal de la résurrection et sommes incapables de le saisir, car nous ne pouvons courir nous-mêmes au sépulcre, et c’est en vain que nous attendons une preuve visible.
Apprendre par le doute
Tu as des doutes ? Et alors ? Thomas en avait aussi. Mais ses doutes n’avait rien d’une entreprise de sape, du genre : « Est-ce réellement… ? »,ils exprimaient bien plutôt sa volonté absolue de savoir.C’est lui aussi qui avait voulu savoir où allait Jésus, avant que celui-ci ne lui réponde : « Je suis le chemin, la vérité et la vie », et c’est encore lui qui exigeait une réponse au moment où Jésus s’était mis en route vers Béthanie : « Allons aussi, afin de mourir avec lui ! »
Il fait preuve de la même opiniâtreté que celle avec laquelle Job était resté fidèle à Dieu : « Je sais que mon Rédempteur est vivant ! », de la même intransigeance que celle avec laquelle Jacob avait combattu : « Je ne te laisserai point aller que tu ne m’aies béni ! »
Quiconque croit de cette sorte parviendra à la contemplation. Il saura reconnaître son Dieu et Rédempteur, et pourra le toucher de tout près.
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